Histoire.

Il faisait nuit sur le ponton. Seule les dizaines de petits lampions placés, comme en rang, de chaque coté du  ponton, sur toute sa longueur éclairaient son visage parsemé de tâches de rousseur. La lune criait avec sa lumière ce qu elle ne pouvait dire avec les mots.

Elle était assise ; son pied gauche se balançait au-dessus de l’eau agitée. Alors que le droit lui replié contre elle soutenait ses bras croisés. Son menton était posé là sur ses bras. Elle avait le regard perdu dans le vide et les vagues, qui venaient se fracasser contre les rochers ne la dérangeaient nullement

Non. Au contraire.

Le bruit de l’eau la rassurait et la laissait réfléchir avec beaucoup de respect. L’écûme blanchâtre de la mer s’obstinait à se heurter contre la rive, trop têtu pour abandonner.

Elle n’entendit guère les pas de l’homme marchant dans sa direction. Il vint s’asseoir à ses côtés. Elle ne bougea même pas. Elle su qu’il était là même si elle ne l’avait ni vu ni entendu.

Elle ne voulait pas tourner la tête et savoir ce qu’il avait à dire. Elle voulait garder les yeux fermés pour ne pas entendre ses excuses. Pour ne pas l’entendre se plaindre à nouveaux.

Il sortit une cigarette de sa poche, la planta dans sa bouche et l’alluma à l’aide d’une allumette. Il dû s’y prendre à quatre reprises avant que ses mains finissent par vouloir arrêter de trembler et qu’une allumette veuille bien se rendre du carnet à sa cigarette sans s’éteindre.

Pour la première fois Sophie tourna la tête vers lui ; comment osait-il fumer devant-elle? Elle lui arracha la cigarette de la bouche, étira son bras vers l’avant et lâcha l’insipide chose qu’elle avait entre les doigts dans les flots sombres qui l’engloutirent immédiatement.

-Je suis désolé. Dit-il. Je…

Sa voix était tremblante et ses mains ne voulaient pas rester en place.

-Je ne sais pas quoi te dire. Reprit-il.

-Alors ne dit rien. Dit-elle tout bas.

Il se leva et revint sur ses pas. Bientôt l’obscurité l’engloutit.